La Petite Bonne - Bérénice Pichat
Voici le genre de littérature qui vous happe et que vous ne lâchez que lorsque le point final stoppe, presque brutalement, le monde où l’auteur a voulu vous entraîner.
Ce monde est un huis clos qui se déroule dans l’espace d’un week-end dans une maison bourgeoise de la banlieue parisienne.
On est au milieu des années 30. La petite bonne travaille dans les maisons bourgeoises et notamment, depuis peu, chez le couple Daniel.
Couple atypique, lui un ancien pianiste, gueule cassée de la première guerre mondiale qui a perdu une partie de son visage et une partie de ses membres. Il vit seul avec sa femme Alexandrine depuis une vingtaine d’années.
L’espace d’un week-end, Alexandrine va pouvoir partir à la campagne, ce qui n’arrive jamais, et laisse la petite bonne s’occuper de Monsieur.
Tous deux vont devoir s’apprivoiser et il va se créer entre eux un lien qu’on n’aurait pas imaginé, jusqu’à ce que Monsieur lui révèle un plan sidérant qu’elle va devoir choisir de suivre ou pas.
Bérénice Pichat a voulu changer du roman historique traditionnel en utilisant des vers libres pour faire vivre le personnage de la petite bonne. Ces vers impliquent une mécanique et une rythmique assez répétitives avec des structures qui reviennent et des phrases courtes, simples. Elles représentent bien cette jeune femme besogneuse, qui est prise dans des taches très fastidieuses mais auxquelles elle s’attaque avec beaucoup de courage.
En revanche pour le couple bourgeois une prose classique est conservée avec beaucoup d’adjectifs, de descriptions. On est installé dans la bourgeoisie.
On alterne entre ces deux styles d’écriture comme si on alternait entre deux visions du monde.
Vous ne sortirez pas indemne de ce magnifique roman. L’incroyable lien qui s’installe entre ces deux personnages, les scènes pour certaines lumineuses, vous attachent à cette petite bonne, à cet homme qui souffre. Alexandrine percluse de culpabilité et de désir de vivre frustré acceptera-t-elle l’état des lieux à son retour ?
CD