Fin de vie : "Après 40 ans de combat, obtenir une loi à la hauteur de nos exigences n’est plus, cette fois, un vain espoir..."
Plus que jamais mobilisée en faveur du droit à l’autodétermination en fin de vie, Noëlle Châtelet, auteur de l’inoubliable La Dernière Leçon et, plus récemment, de Laisse courir ta main se confie aux lecteurs du Journal de l’ADMD. Entretien avec une femme de cœur et de conviction...
Vous êtes une femme libre et engagée. Nous connaissons tous La Dernière Leçon que votre mère vous a apprise... Pourquoi militer pour le droit de mourir dans la dignité, et faire de votre chemin personnel un combat d’intérêt général ?
Sans la leçon de ma mère, en effet, pour comprendre cette ultime liberté qu’est le droit de choisir sa mort sans le travail d’apprentissage personnel – car j’ai dû dé - battre avec moi-même – je ne serais pas devenue la militante que je suis. À la sortie du livre consacré à cette expérience et à l’abondance des courriers reçus, j’ai pris conscience de cette terrible réalité : on meurt mal en France ! Ne me devais-je pas, alors, de tenter à ma façon de répondre aux appels au secours déchirants des Français en quête d’une belle mort ? En faire un devoir moral et sociétal ?
Depuis de nombreuses années, vous êtes la présidente du comité d’honneur de l’ADMD. Comment mobilisez-vous les personnalités qui composent ce comité prestigieux ?
Depuis 18 ans maintenant, je saisis toutes les occasions d’alerter sur cette question essentielle. Les personnalités qui s’engagent à leur tour ont valeur d’exemple pour beaucoup. Ces personnalités du monde de la pensée et de la culture sont des références. Elles enrichissent le débat, où la sensibilité et le talent sont au rendez-vous. Le monde de la création est effectivement très présent dans le comité d’honneur que vous présidez... Oui, à juste titre. Je crois à la puissance de l’art sous toutes ses formes pour porter haut et fort le message de liberté et d’humanité que nous demandons. L’art a pour lui la force de l’émotion ; c’est une arme parfois plus persuasive que les discours...
Le moins que l’on puisse dire est que les présidents sont restés bien frileux sur le droit à mourir en France. Ce n’est pas faute de leur avoir parlé les yeux dans les yeux (je pense à François Hollande et à Emmanuel Macron). Frileux par opportunisme ? Par lâcheté ? Par méconnaissance, surtout, du souhait de nos concitoyens qui, à 95%, attendent d’eux une réponse ferme et courageuse sur le droit de choisir sa mort et, surtout, d’y être aidé. En avril prochain, c’est sur ce courage que nous jugerons chacun des candidats, et sur leur aptitude à entendre enfin ce que veut le pays.