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Loi sur la fin de vie : "Les gens ont besoin de s’exprimer." - France 3

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Communiqué
27 mars 2018
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Jean-Luc Romero participera dans l'après-midi au colloque sur la fin de vie organisé par l'association du Master 2 Carrières Judiciaires de la Faculté de Droit de Clermont, avant d'intervenir ensuite dans la soirée à Mozac dans le cadre d'une réunion publique sur la fin de vie organisée par Christine Pirès-Beaune, députée Nouvelle Gauche (PS) du Puy-de-Dôme.

Il publiera le 12 avril prochain un ouvrage intitulé "Lettre ouverte à Brigitte Macron - #MaMortMAppartient" (aux éditions Michalon).

France 3 Auvergne : Cela fait plusieurs mois que vous vous exprimez dans toute la France sur la fin de vie, en quoi est-ce important pour vous de témoigner dans le Puy-de-Dôme ?

Jean-Luc Romero : On se trouve actuellement au cœur d’un débat citoyen ouvert par les États généraux de la Bioéthique depuis janvier et c’est le moment plus que jamais pour l’ADMD d’intensifier notre action. Les gens ont besoin de parler, je dois dire que je ne sors pas toujours indemne de ces réunions où les gens confient des expériences de grandes souffrances qu’ils ont vécues avec leurs proches.

La loi Claeys-Léonetti du 3 février 2016 (qui permet la sédation profonde et continue pour les patients en phase terminale sous conditions NDLR) crée de nouveaux droits pour les personnes en fin de vie : pourquoi vouloir une nouvelle loi ?

J-L. Romero. En 13 ans, on a eu 3 lois successives sur la fin de vie en France. La dernière loi de 2016 n’est qu’une opération de communication et de recyclage des législations précédentes, qui n’a résolu aucun problème. Bien au contraire, elle a restreint le champ de la sédation terminale qui existait auparavant. Tout le monde s’accorde à dire que les lois ne sont pas bien appliquées. La dernière loi n’évoque même pas l’acharnement thérapeutique alors que le rapport Léonetti reconnaissait la pratique de l’acharnement thérapeutique dans un certain nombre d’EHPAD, avec des malades alimentés à l’eau sucrée qui en viennent à arracher leurs perfusions. En hôpital, d’ailleurs, 50% des chimiothérapies sont réalisées au cours des 15 derniers jours de la vie : si cela n’est pas de l’acharnement ! Nous voulons une loi qui mette enfin le patient au centre des décisions.
Je me bats également pour l’accès universel aux soins palliatifs. Aux Pays-Bas, en Belgique, au Luxembourg c’est possible : en France, nous n’y mettons pas les moyens nécessaires.

Qu’attendez-vous des travaux des États Généraux de la Bioéthique lancés mi-janvier ?

J-L. Romero. Je me réjouis de cette consultation. Nous allons tous un jour ou l'autre mourir, nous sommes ainsi 66 millions à pouvoir nous exprimer sur la fin de vie: pas besoin d'expert, il n'y a l’air d'y avoir que les parlementaires qui ne le sachent pas. Je voudrais qu’après le slogan « mon corps m’appartient » des militantes pour le droit d'avorter émerge « ma mort m’appartient ». On sent une colère des gens qui se sentent, année après année, dépossédés du débat. Il y a une effervescence particulière chez les gens cette année, qui ont besoin de s’exprimer dans un débat trop longtemps réservé aux professeurs de médecine. D’ailleurs, la prise en charge de la fin de vie est l’un des thèmes qui suscitent le plus de contributions sur le site des Etats généraux. Je lisais un sondage dans la Croix qui disait que 89% des Français considèrent important de légaliser l’euthanasie: les gens sont prêts.

La Conférence des évêques de France a évoqué le 22 mars dernier d’éventuelles dérives qu’ouvrirait l’autorisation du suicide assisté, alors qu’on met en place des plans de lutte contre le suicide : que leur répondez-vous ?

J-L. Romero. Je n’y vois aucun paradoxe : quand on parle de suicide assisté, on parle de personnes en fin de vie qui ont le choix entre deux morts, autant respectables l’une que l’autre. Nous sommes dans un Etat laïc, et je ne connais aucun principe supérieur de mourir dans la souffrance dans la République.

Vous faites souvent référence aux cas d’Anne Bert et de Jean Mercier, en quoi vous inspirent-ils ?

J-L. Romero. Ces deux histoires éclairent notre combat. L’écrivaine Anne Bert (atteinte de la maladie de Charcot, elle a subi une injection létale en Belgique en octobre 2017 à sa demande NDLR) dénonçait dans une lettre posthume l’injustice criante entre les personnes qui ont les moyens d’être euthanasiés à l’étranger et ceux qui n’ont d’autre choix qu’un suicide violent et non accompagné.
En ce qui concerne Jean Mercier (octogénaire ayant aidé sa femme à mourir en 2011 à Saint-Etienne NDLR), on est dans une illustration de l’hypocrisie de la législation française face au suicide assisté. Les multiples décisions judiciaires ont acquitté ce pauvre veuf, qui n’a fait qu’aider son épouse dans sa volonté de ne plus souffrir et a été relaxé. Pourtant, on l’a traîné dans des années de procédures coûteuses pendant des années pour rien. La loi n’est plus appliquée et les législateurs sont restés sourds face à la souffrance pendant des années.

Vous allez publier prochainement une lettre ouverte à Brigitte Macron, pourquoi s’adresser à elle en particulier ?

J-L Romero. Il y a deux raisons à cela : d’abord, lorsque je parle avec les gens aux réunions, ils me disent « Les politiques ne nous ont jamais entendus, pourquoi vous ne vous adressez pas à Brigitte (Macron) ? ». Or, si j’ai bien lu son nouveau statut, la Première dame se préoccupe notamment des personnes vulnérables et des questions de santé. Ensuite, j’ai observé que les droits avancent souvent grâce à des femmes, Simone Veil pour la légalisation de l’IVG et Dominique Bertinotti et Christiane Taubira pour le mariage pour tous par exemple. A travers Mme Macron, je m’adresse à son mari bien évidemment et aux parlementaires de la majorité. J’avais déjà écrit à l’époque une lettre à François Hollande qui était restée lettre morte, alors pourquoi pas à la Première Dame ?

Sentez-vous que les lignes bougent dans l’exécutif ?

J-L. Romero. J’ai eu l’occasion de dîner le 13 février avec le Président de la République avec une quinzaine d’autres personnes : sans pouvoir vous dire quel sera son arbitrage, je peux vous dire qu’il écoute et qu’il a remarqué la tribune transpartisane des députés parue le 1er mars dans le Monde. Nous n’avons jamais eu une telle majorité pour un texte sur la fin de vie.

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